01 46 99 77 77

LA MINUTE SEINEO

Garantie des vices cachés

Lors de l’achat d’un bien immobilier, le prix est censé être négocié au regard de toutes les qualités que présentent ce bien mais aussi de ses défauts. Cependant et ainsi qu’en témoignent les nombreuses décisions de justice rendues à ce sujet, il n’est malheureusement pas rare qu’un acquéreur, ayant constaté après signature de l’acte de vente des défauts dont il n’avait pas connaissance, vienne agir contre son vendeur pour lui demander réparation du préjudice allégué.
Nous nous attarderons dans un premier sur le mécanisme de la garantie des vices cachés, avant d’aborder dans un second temps la question des délais de mise en œuvre de ladite garantie, notamment suite à de récentes précisions jurisprudentielles.

VADE-MECUM DE LA GARANTIE DES VICES DANS L’ANCIEN

1. Les conditions de mise en œuvre

Pour pouvoir agir sur le fondement de la garantie des vices cachés, l’acquéreur mécontent doit pouvoir prouver les 4 conditions suivantes :

  • Que ce vice affecte l’usage normal et habituel du bien.

Si le vice, sans rendre impossible cet usage, ne fait que le réduire, le requérant doit également prouver que cet usage alors était déterminant dans son consentement.
Exemples : une fente dans un mur extérieur dès lors que ce désordre a une incidence sur la solidité de l’immeuble,

le défaut de raccordement de la maison au réseau collectif d’assainissement…

  • que ce vice soit caché.

Si l’acquéreur est un non-professionnel, le défaut est réputé caché s’il a pu légitimement en ignorer l’existence au moment de la vente et s’il a porté toute l’attention nécessaire à l’examen du bien.

Si l’acquéreur est un professionnel, il est présumé connaître le vice, sauf si ce dernier était indécelable au jour de la vente.

  • que ce vice soit inhérent à l’immeuble.

Ce qui ne signifie pas qu’il doive avoir une origine interne à l’immeuble et ne puisse pas provenir de facteurs extérieurs. Exemple : des nuisances sonores provenant de la chaufferie d’un immeuble située en sous-sol sous l’appartement vendu.

  • que ce vice soit antérieur à la vente ou soit en germe à la date de celle-ci.

2. Le mécanisme de la garantie

En mettant en œuvre la garantie des vices cachés, l’acquéreur a le choix entre 2 options :

  • soit il restitue le bien en échange de la restitution du prix ;
  • soit il garde le bien en échange de la réduction du prix.

Toutefois, seule la réduction du prix peut être demandée quand l’immeuble ne peut plus être restitué au vendeur, notamment en raison d’une perte de l’immeuble par cas fortuit.

En dehors de la restitution totale ou partielle du prix, le vendeur peut être tenu de payer des dommages-intérêts à l’acquéreur pour le préjudice subi par ce dernier.

Ce régime général de la garantie des vices cachés n’étant pas impératif, les actes de vente contiennent très généralement une clause d’exonération de garantie sous réserve de l’application des dispositions spécifiques liées à certains vices (plomb, termites, amiante…). Notons cependant que ces clauses sont inefficaces dans 3 hypothèses :

  • elles ne peuvent être invoquées que par un vendeur de bonne foi qui ignorait donc le vice ;
  • elles ne peuvent être invoquées par un vendeur professionnel qui est présumé de mauvaise foi (mais le vendeur professionnel peut les invoquer si l’acheteur est lui-même un professionnel de la même spécialité) ;
  • elles ne peuvent être invoquées lorsque le vendeur a commis une faute lourde ou un dol.

LES DÉLAIS

1. Garantie des vices cachés et délai de prescription

Jusqu’alors, on savait que pour agir contre le vendeur au titre de la garantie des vices cachés il fallait, conformément à l’article 1648 du Code Civil, agir « dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice ».
Mais un doute subsistait quant à la fin de la période pendant laquelle l’acquéreur pouvait toujours agir après la vente, puisqu’il fallait articuler ce délai de 2 ans avec le délai de prescription de droit commun.

Aux termes d’une décision de la 3ème Chambre civile de la Cour Cassation rendue le 8 décembre 2021, il a été rappelé que l’action en garantie des vices cachés est encadrée dans le temps par le délai butoir de 20 ans de l’article 2232 du Code Civil. On ne peut donc plus agir en garantie des vices cachés au-delà de 20 ans courant à compter du jour de la vente.

Il demeure que cette solution est cantonnée aux ventes entre particuliers et ne concerne donc pas celles entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants, où la prescription de 5 ans s’applique en vertu de l’article L.110-4 du Code de commerce.

2. Garantie des vices cachés et délai d’action

Un arrêt de la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation en date du 5 janvier 2022 a également tranché une difficulté liée à la nature du délai de 2 ans de l’article 1648 du Code Civil.
En l’espèce, un acquéreur avait sollicité du juge des référés la nomination d’un expert qui a rendu un rapport confirmant l’existence d’un vice et sur la base duquel l’acquéreur a par la suite assigné les vendeurs. Néanmoins, les conclusions de ce rapport d’expertise ont été rendues après l’expiration du délai de 2 ans de l’article 1648 susvisé.

Dans sa décision du 5 janvier 2022, la Cour de Cassation a rappelé que le délai de deux ans dans lequel doit être intentée l’action résultant de vices rédhibitoires, prévu par l’article 1648 du Code Civil, est un délai de forclusion qui n’est pas susceptible de suspension, mais qui, en application de l’article 2242 du même code, peut être interrompu par une demande en justice jusqu’à l’extinction de l’instance.

En pratique l’acquéreur aura donc tout intérêt à interrompre le délai des 2 ans par l’introduction d’une demande au fond, quand bien même l’expertise ne serait pas terminée.

Vous souhaitez télécharger cet article au format PDF ? Cliquez ICI.

Vous avez un projet ?
Contactez-nous